mardi 22 février 2011

Fut un temps




Par hasard (?) je suis tombée sur une vieille connaissance dans la rue ce matin...
C’est le genre de rencontre qui vous laisse toute chose pour le reste de la journée...

Fut un temps,
cet homme a été mon prof de projet.
Il s’appelait Paul.
Quarante ans, marié, deux enfants.
Moi j’étais jeune et libre comme l’air.
Il ne m’a pas vu tout de suite.
Ce n’était pas grave, j’avais tout mon temps.

Il a fallu quelques semaines pour que lui aussi se rende à l'évidence:
On s'attirait comme deux amants.
L’année s’est déroulée dans la chaleur de nos non-dits.
Dès qu’il passait le pas de la porte de l’atelier,
j’étais apaisée,
et lui aussi de me voir toujours à la même place.
Des frôlements de genoux sous les tables, des discussions sur le parking après les cours.

A plusieurs reprises, l'ambiguïté s’était transformée en criante vérité.
Lorsque le rapprochement semblait trop dangereux,
on s’éloignait un temps pour mieux se retrouver.
On n’avait jamais mis de mots sur cette délicieuse relation.
Je ne connaissais même pas son numéro de téléphone.

A quelques jours de mon rendu, j’étais complètement débordée.
Je restais très tard le soir pour avancer.
Un soir vers onze heures,
alors que je pensais être seule dans les ateliers,
je suis tombée sur Paul qui corrigeait des copies.
Une immense gène nous a envahit,
pour la première fois,
aucun regard extérieur n’accompagnait notre drôle de couple.
Cela ne faisait pas partie de nos habitudes, de nos règles.
On s'apprêtait à repartir chacun dans une direction.

Mais un autre étudiant, que je ne connaissais absolument pas, se précipita sur Paul pour lui poser mille questions sur le diplôme.
Paul nous proposa alors d’aller boire une ou deux bières pour se détendre.

C’était ce jeu là qui nous excitait,
être à la vue des autres pour ne pas dépasser les limites.

On a descendu deux bières presque instantanément,
on avait le ventre vide, on était déjà bien ivres.
Dans un excès de zèle,
je proposai à Paul et à Pierrick, l’autre étudiant,
d’aller finir cette soirée dans un bar ultra chic au sommet du plus grand hôtel de la ville.

On s'acheta des cigares et on commanda une bouteille de champagne.
Pourquoi le champagne est-il tant associer à la luxure?...

La totalité de nos conversations tournèrent donc autour du sexe.
Ce qu’on en attendait,
ce qu’on en connaissait,
le désir,
le plaisir....
Nous avons baisés à découvert
avec des mots,
avec des regards et des frôlements.
Je me sentais voler au dessus de la ville.
Je l’imaginais m’attraper par les hanches,
me soulever sur la table et me prendre au milieu de ce bar.
Tous les clients continueraient leur conversation comme si tout était normal.

Pierrick, notre faire valoir, était tellement ivre qu’il ne rendait plus compte de rien.
Les bouteilles se succédaient.

Paul me dit qu’avec sa femme c’est compliqué, qu’il l’a déjà trompée, puis que non, puis qu’il est très timide et qu’il n’accoste jamais personne.

Je ne savais pas déceler le vrai du faux mais je m’en fichait éperdument.
Ce n'était pas mon problème, c'était lui l’homme marié.
Je ne désirais pas autre chose que de le rendre complètement fou dès qu’il croisait ma minijupe dans les couloirs de l’école.

Le bar fermait à 4h et il a bien fallu que l’on s’en aille.
On parvint à s’extirper de nos sofas, on tenait à peine debout…

Je ne me souviens pas de tout,
juste de cette incroyable légèreté de mon être

On attendait l’ascenseur.
Il me déposa contre le mur.
Il me caressa la poitrine, les fesses, fit courir ses mains
sous ma jupe.
Il ne m’embrassa pas,
Comme si s’abstenir d’un baiser signifiait qu’il ne trompait pas sa femme.

le désir,
le plaisir,
Encore une fois.

Je ne bougeais pas,
Je me laissais faire et refaire devant cet ascenseur qui n’arrivait pas...

On se retrouva finalement tous les trois dans la rue déserte,
on était complètement bourré à la légèreté.
Un dernier frôlement, des regards insistants, la séparation.

Il savait qu’il était allé beaucoup trop loin.
Je l’ai laissé gérer sa culpabilité pendant quelques semaines.
Moi j’étais rassasiée de désir, je suis allée chercher le plaisir ailleurs.
La fin de l’année est arrivée, il a eu l’air soulagé.
En quittant l’école pour toujours je lui ai adressé le plus léger de mes sourires.

Ça nous rajeunit pas cette histoire...
Quel connard quand j’y pense en tant que femme mariée...
Il est tard d’ailleurs...
Il est où le mien???...

3 commentaires:

  1. C’était il y a ...au final si peu de temps car on garde toujours l'âme de ses 20 ans.
    Il a peut être gardé son âme de 20 ans, mais il a quand même perdu de sa superbe : les bières ont eu raison de sa silhouette et l'homme est désormais bien "mûre", le crâne s'est dégarni et la petite mèche qui désespère de voler au vent me fait de la peine, l'alliance est toujours à son doigt mais sa chemise n'est pas repassée et laisse à désirer, il roule en familiale mais il n'y a plus de siège auto à l'arrière ...

    parfois, il vaut mieux ne pas se retourner et garder un bon souvenir d'un fantasme "adulto-ados" ...

    C’est une fin possible qui fait un peu descendre la pression ... fait chaud nan ?

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  2. merci Modidile pour cette fin, hélas, très réaliste...
    J'éspère que ce n'est pas la description que je ferais de mon mari dans 20 ans...

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